Traversée des Pyrénées françaises à VTT par Christian Fargeix en solitaire
Je me lève à 8h-10. Pourquoi se lever plus tôt pour une si courte étape me dis-je très optimiste! C'est le début d'une journée désastreuse! Dès le départ j'ai très mal au périnée (c'est quoi
cette bête? c'est un endroit intime surtout avec la selle du vélo et qui est très douloureux quand il s'enflamme après de longues heures d'intimité avec ladite selle). Je me déleste de mon sweat pour l'enrouler autour de la selle afin qu'il serve de coussin, c'est à moitié efficace
mais çà va me permettre d'endurer. la première partie est une longue montée jusqu'à 1230m dans un brouillard dense, tant pis pour le paysage. Puis après le passage au col des 7 frères, c'est la
descente des gorges de la Frau. Le chemin en forte pente descendante longe un torrent encaissé entre deux falaises verticales d'au moins 50m de hauteur. C'est impressionnant et magnifique! Le sol
est jonché de rocailles humides et glissantes, une chute pourrait être grave de conséquences, prudence maximum!
Il fait frais, ici les rayons du soleil ne peuvent pas accéder! Vers midi j'arrive au hameau de Pelaie altitude
700m où je m'assois 1/2 heure pour casser la croûte. J'en profite pour réfléchir à la suite de mon parcours car j'ai maintenant 2 solutions: ou je monte par le GR qui d'après un randonneur
rencontré ce matin est totalement déconseillé en VTT, ou je contourne par la route pour rejoindre Montségur avec 20km de plus. Je suis presque décidé à prendre la route sur conseil du randonneur,
lorsque surgit d'un véhicule jaune marqué "La Poste"...le diable! "Pardon Monsieur, savez-vous si ce chemin est carrossable en VTT?" "bien sûr, c'est un chemin très fréquenté par vélos et motos,
çà ne pose aucun problème!" le bougre m'avait volontairement envoyé en enfer, sans doute pour apaiser son amertume de voir que certains s'amusent pendant que lui travaille, ou pour je ne sais
quelle autre raison pernicieuse! Les 2 km qui vont suivre resteront ancrés dans ma mémoire de VTTiste comme les plus horribles que je n'ai jamais parcourus!
Le dénivelé
est de 400 m, soit 20%, le sentier est boueux, jonché de pierres et rochers en tout genre, d'énormes
marches glissantes où il faut hisser vélo et bagages en équilibre plus qu'instable, et en plus...il pleut! A chaque virage la difficulté s'accentue. Je perds d'abord mes gants que je ne
retrouverai pas, puis mes lunettes que par chance je retrouverai dans la boue après être redescendu de 300 m, je perds aussi le moral que je retrouve aussi mais plusieurs heures plus tard! Après
2 heures d'acharnement et à la limite de l'effondrement, j'arrive sur un sentier toujours boueux et pleins d'ornières mais horizontal. J'arrive enfin à Montségur, il tombe des cordes, je suis
minable! Je m'arrête sous un porche 1/4 d'heure pour récupérer car la journée est loin d'être terminée! Me voilà reparti sous une pluie battante. Je rencontre une troupe de cavaliers qui, je vais
m'en apercevoir rapidement, ayant emprunté mon itinéraire dans le sens inverse, ont complètement pourri les chemins déjà très boueux. L'itinéraire est certes descendant mais devenu impraticable.
Je suis le plus souvent à côté du vélo dans la boue. Il est 18h je pense être presque arrivé mais la tête est fatiguée et je me trompe d'itinéraire, me retrouvant dans un bois sur un sentier en
forte pente et presque invisible. Grâce au GPS je m'en sors, il est 19h. J'arrive dans un village où je demande à une habitante comment rejoindre rapidement Roquefixade. Elle m'indique la
direction par la route. Ca fera 3 km de plus mais au moins je suis sûr d'arriver. Effectivement j'arrive au gîte à 20h.
Je suis un tas de boue ambulant mais la réception est chaleureuse. Brigitte et Christian qui tiennent le gîte (relais des Pogs) depuis 18 ans mettent tout leur confort à ma disposition: pantoufles, salle de bain, chauffage, lavage du vélo, et avant le
lit, excellent repas à la table d'hôtes en compagnie d'un groupe de joyeux lurons de Montpellier venus se dégourdir les jambes sur les GR locaux. Il est minuit quand je m'endors après avoir
rempli la salle de bains de mes affaires trempées, je ne sais pas encore si je pourrai repartir demain, même mon duvet est mouillé!